De nombreuses entreprises connaissent les écueils classiques des grands projets de transformation : dérive systématique des plannings, explosion des coûts, conflits à répétition… Derrière ces dysfonctionnements visibles se cache, dans de nombreux cas, un constat simple : les entreprises se dispensent trop souvent de mettre en œuvre les modes de travail véritablement adaptés à la gestion d’un projet d’envergure. Parmi les meilleures pratiques à mettre en place, il est essentiel, pour sécuriser ce type d’initiative stratégique, de définir une ligne directrice claire, sorte de « nord magnétique » permettant d’en maîtriser les digressions et de rapidement retrouver les trajectoires vertueuses.
Projets de transformation : quand l’enthousiasme vire à la panique…
Repenser l’organisation des services, optimiser les pratiques des différents métiers de l’entreprise, aligner le système d’information… : les grands projets de transformation visent à modifier les entreprises en profondeur, sur un large périmètre et sur le long terme. Ils mobilisent généralement les meilleures équipes opérationnelles et les plus brillants directeurs, pendant plusieurs mois, sur des problématiques souvent complexes et mouvantes, susceptibles d’évoluer au fil du temps et des impondérables.
Il n’est pas rare, hélas, que ces projets dérivent : surprises fonctionnelles, problèmes techniques imprévus, intervenants tout compte fait mal sélectionnés, collaborateurs clés du projet indisponibles. Avec pour conséquences, multiplication des réunions de crise, retards, dépassement des budgets initiaux ou encore problématiques de politique interne… Les désaccords et les incompréhensions se multiplient, le temps passe, les équipes, si enthousiastes au départ, commencent à ”décrocher” et le projet, parfois dans un climat proche de l’hystérie, dérive inexorablement. Bien souvent, la responsabilité n’est imputable qu’au manque de préparation en amont. Une étape préalable ô combien essentielle, et que les entreprises ont encore – dans les faits – trop souvent tendance à négliger.
Repenser le mode projet à travers le prisme de la performance
Car le travail en mode projet est une discipline à part entière, et ne peut être pensé comme un simple travail d’équipe à plus grande échelle. Du fait de ses enjeux, de son envergure et du nombre de parties prenantes qu’il mobilise, un projet de transformation doit faire l’objet d’une phase de préparation rigoureuse, permettant de s’assurer que tout est prêt pour un lancement dans les meilleures conditions possibles. Ce cadrage doit notamment permettre de définir des objectifs métier clairs et mesurables, qui permettront de mettre en œuvre les moyens, notamment humains, les plus adaptés pour réussir le projet.
Ces objectifs doivent ainsi être orientés business – le projet permet-il de réellement améliorer les performances ? Cette notion de performance métier est en effet essentielle, en ce qu’elle permet de donner ce « nord magnétique » au projet, cette référence qui permettra de maîtriser les éventuels écarts rencontrés tout au long de la vie du projet. Réduire le temps de réponse du service client, augmenter les parts de marché, réduire les stocks de X%, etc. sont autant d’exemples d’objectifs de performances business bien plus concrets et fédérateurs que des objectifs plus flous de type ROI. Et permettent surtout d’évaluer de manière beaucoup plus précise la réussite du projet : en mesurant les performances avant et après la mise en œuvre du projet, on peut aisément déterminer le degré de succès.
Une démarche « perfo-centrée » pour multiplier les chances de succès
Les performances métiers doivent être au cœur du projet, dès la phase de cadrage et pendant toute sa conduite opérationnelle. Il s’agit d’abord de mobiliser les différentes équipes concernées dans la phase d’expression des besoins. Des ateliers et des sessions de brainstorming permettent ainsi de formaliser leurs besoins en objectifs de performance, et de les impliquer de manière très concrète dans le projet. Les objectifs définis sous le prisme de la performance métier deviennent plus parlants et plus palpables, non seulement pour les équipes et les utilisateurs concernés, qui perçoivent beaucoup mieux les tenants et les aboutissants du projet et ce qu’ils vont y gagner, mais aussi pour le management, voire pour la direction générale.
Avec cette approche, et tout au long du projet, la prise de décision est grandement simplifiée dès lors que l’ensemble des parties prenantes parle le même langage. Un manager pourra plus aisément répondre à une problématique présentée sous l’angle de l’impact business que sous celui, plus abstrait, de l’impact technique d’une solution. Les échanges entre équipes opérationnelles, management et prestataires redeviennent intelligibles et permettent d’avancer plus vite, dans une direction connue et comprise par tous.
Si l’orientation « perfo-centrée » du projet est un facteur clé de réussite, elle n’en est bien évidemment pas la seule. Elle s’inscrit en effet dans un dispositif bien plus large, au sein duquel s’articulent trois autres grands leviers de sécurisation des projets : l’accompagnement du changement, l’organisation interne du projet et le contrôle de la qualité.
Daniel Aslanidès